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Ευρωπαϊκή Εταιρεία Νεοελληνικών Σπουδών

Γ΄ συνέδριο της Ευρωπαϊκής Εταιρείας Νεοελληνικών Σπουδών

Κύριλλος Νικολάου

L’Hellénisme en dilemme. Entre l’idée oecuménique et l’idée nationale au temps de la Révolution grecque de 1821 : L’attitude de Kyprianos, Archevêque de Chypre.

1. Le cadre général. La lutte trompeuse entre l’idée oecuménique et l’idée nationale.

Pendant la période antérieure à la Révolution grecque, le concept de l’émancipation nationale des Grecs[1] n’était pas clair. Certains chefs des Grecs, en particulier ceux qui étaient les plus proches du haut clergé et des familles phanariotes de Constantinople[2], croyaient que leur ascendant matériel[3] et culturel sur l’Empire ottoman allait permettre progressivement d’“helléniser” l’Empire et de le transformer éventuellement en un Etat gréco-ottoman. Les partisans de cette théorie n’ont pas encouragé la destruction de l’ordre établi. Mais les chefs de l’Hétairie, tout comme Rhigas et Korais, n’étaient pas du même avis[4]. Ils envisageaient l’établissement d’un Etat essentiellement grec avec l’association volontaire de toutes les nationalités. En tout cas, la Révolution grecque ne fut pas une révolution balkanique, mais elle eut un caractère grec, et elle produisit un petit état grec[5].

De sérieux arguments plaidaient en faveur de l’opinion que les buts que se proposait l’hellénisme seraient mieux servis si l’on ne touchait pas à l’intégrité de l’Empire ottoman, de sorte à ce que l’Eglise patriarcale grecque, en tant que survivance de l’ancien Empire byzantin, devienne l’annonciatrice du nouvel Empire. Cette forme de la Grande Idée était cependant aux antipodes de l’ambition nationale de réunir les orthodoxes, Slaves et Grecs, en un royaume national grec. Inversement, le Patriarcat et l’élément grec de Constantinople, déjà depuis l’époque d’avant la Révolution de 1821, aspiraient à l’idéal oecuménique byzantin. Conformément à cela, l’hellénisme, après avoir été d’abord la force souveraine au sein de l’Empire ottoman, finira par être son héritier effectif, en le transformant en un “Etat ottoman de la Nation grecque”[6].

Si les Grecs de la péninsule hellénique nourrissaient des sentiments révolutionnaires, les Grecs de Constantinople, de Thrace, d’Asie Mineure et de Chypre[7], comprenant que leur émancipation par la voie de la révolution ou de la guerre était une chose fortement improbable, adoptèrent au contraire une politique de coexistence avec les Turcs pour sauvegarder leur existence[8].

En-dehors de l’aspect géographique, un autre aspect, celui de la tradition, se développa au même moment. Entre les deux traditions, byzantine et néo-classique, avait toujours couvé une lutte trompeuse. Alors que les partisans de l’esprit hellénique soulignaient l’unité des hellénophones (de ceux qui se considéraient comme les descendants des anciens Grecs), le Patriarcat, lui, mettait ordinairement l’accent sur l’unité de tous les chrétiens de l’Empire ottoman, entendant par là ceux qui parlaient une langue slave, le turc ou n’importe quelle autre langue[9]. Il faut parler ici du rôle du Patriarcat, dont la juridiction religieuse s’étendait à tout l’Etat ottoman: Le caractère oecuménique du Patriarcat de Constantinople ne lui permettait pas de se comporter comme s’il eut été le chef d’un Etat national[10] et comme si l’Orthodoxie constituait le noyau de la politique étrangère. Par ailleurs, les Grecs de Constantinople étaient les héritiers d’une riche tradition culturelle qui remontait à l’Empire byzantin. Les Grecs Phanariotes étaient les diplomates de l’Empire turc. A titre d’exemple, Karadotori Pacha, le représentant de l’Empire ottoman au Congrès de Berlin, était un Grec du Phanar. Autrefois, au XVIIIe et au début du XIXe siècle, furent Grecs tour à tour les princes régnants des principautés roumaines de Valachie et de Moldavie.

Tenant compte du rang qu’occupaient les Phanariotes à Constantinople et dans les principautés, il n’est pas fait mention de leur participation à la Philiki Hétairia. D’autre part, les chefs de l’Hétairie étaient réservés et indécis chaque fois qu’il s’agissait d’initier un Phanariote. Les Phanariotes étaient la classe dirigeante du genos[11] et pour les faire membres, il fallait en même temps leur passer le commandement de l’Hétairie, ce qui ne paraissait pas prudent. L’initiation d’un Phanariote, surtout avec la perspective d’une place dirigeante dans la Société Secrète, entraînait un risque de mécontentement. Même si les centres d’activité de l’Hétairie étaient Constantinople et les principautés roumaines, les Phanariotes ne figurent point sur les listes des initiés à l’Hétairie dans les premières années. Le premier grand Phanariote initié le 7 octobre 1816 à Moscou fut Alexandre Mavrocordatos. Par la suite, en 1818, fut initié à Jassy Théodore Negris, et en 1820 à Bucarest Grégoire Soutzos. Mais le grand succès de l’Hétairie fut d’avoir gagné Alexandre Ypsilantis, en avril 1819. En effet, c’est depuis cette époque que les chefs ecclésiastiques, militaires et politiques du genos, hésitants jusqu’à ce moment à s’engager à cause de leur expérience des conséquences des révolutions mal préparées, s’initient à l’Hétairie et participent à la préparation de la révolution. A cette époque, beaucoup de Phanariotes, surtout de l’entourage de la famille des Ypsilantis, s’associent à l’Hétairie. Après la prise du commandement de l’Hétairie par Ypsilantis, ce qui s’imposait avant tout était de s’allier Alexandre et Mihail Soutzos, respectivement princes de Valachie et de Moldavie. C’est à la cour de Mihail Soutzos que vécut longtemps Kyprianos. Dans le cas de Kyprianos, nous observons une progression analogue à celle des Phanariotes, puisque Kyprianos semble avoir été hésitant quant à son engagement dans l’Hétairie, et qu’il tarda à en devenir membre, tout comme les Phanariotes. Plus précisément, le protecteur de Kyprianos, Mihail Soutzos, bien qu’il fût d’avis de retarder la révolution afin de mieux la préparer, accepta définitivement tous les plans d’Ypsilantis pour la proclamation de la révolution à Jassy. Mais il est vrai que, initiés ou non à l’Hétairie, étant ou non en connaissance de la révolution, les Phanariotes payèrent la révolte de leurs compatriotes et coreligionnaires par des fleuves de sang. Kyprianos connut le même sort. Même si elles n’avaient donné aucun motif de mécontentement, et que certaines personnes étaient même jusqu’à la veille de la révolte les favorites du Sultan, elles payèrent de leur vie leur engagement dans la révolution[12]. A ce point, nous devons souligner que l’Eglise chypriote suivit fidèlement l’œcuménisme du Phanar et de ses partisans durant toute la période ottomane.

2. Les dilemmes et les inquiétudes de Kyprianos. Entre l’oecuménisme du Phanar et les idées révolutionnaires.

A Chypre, comme parmi tout le reste de l’Hellénisme, s’était développée à la fin du XVIIIe siècle une élite locale, constituée des évêques, de riches commerçants, de dignitaires au service du Sultan, de drogmans, de consuls des Grandes Puissances et de protégés des consuls[13]. L’Archevêque ne manquait pas de donner son avis sur la nomination ou la révocation de l’Administrateur et veillait au recouvrement et à l’envoi des impôts au Trésor impérial[14]. La puissance de l’archevêque fut ébranlée par les événements de 1804, et les massacres de juillet 1821 y mirent fin. Kyprianos, archevêque de Chypre depuis juin 1810, demeura dans l’histoire comme l’un des archevêques les plus connus de Chypre, en raison de sa mort en martyr, par pendaison. Il est également connu pour avoir fondé le Gymnase Panchypriote, la première école de type “lycée” à Chypre[15].

Dans le cadre de la lutte trompeuse entre les deux tendances, oecuménique et nationale, nous allons essayer de comprendre l’attitude de Kyprianos, qui était à la veille et au moment de l’éclatement de la Révolution grecque, archevêque de Chypre, et donc chef des Grecs de l’île. L’attitude de Kyprianos face à la révolution grecque peut être qualifiée d’ambiguë. Nous ne savons pas exactement, en raison du manque d’éléments suffisants, s’il était question que la révolution s’étende aussi à Chypre, et quelle fut exactement la position de Kyprianos à ce sujet.

A. Une sage obéissance à l’Etat ottoman. Une influence phanariote?

Il est certain que Kyprianos fut influencé directement par les points de vue du Patriarcat OEcuménique et des Phanariotes en ce qui concerne l’avenir de l’hellénisme et l’évolution ou la transformation de l’Empire ottoman[16]. Lorsqu’il était jeune, il entra comme novice au monastère de la Vierge à Machairas[17]. Au début de 1783, il fut envoyé par l’Higoumène Ioannikios en Moldavie, accompagné de son oncle Charalambos, archimandrite du monastère, dans le but de récolter des fonds en faveur de leur monastère. Charalambos rentra de Moldavie deux ans plus tard. Kyprianos demeura làbas et, sur la suggestion du prince phanariote de Moldavie Mihail Soutzos[18], il fut ordonné hiéromoine en 1785 et nommé curé à l’église paroissiale de la principauté de Jassy. Il rentra à Chypre en 1802, après un séjour de dix-neuf ans à Jassy. Là, il connut le climat politique des Phanariotes[19]. Homme instruit et fort habile dans l’art de la diplomatie phanariote, Kyprianos ne tarda pas à devenir intendant de l’Archevêché. Inspiré par les idées oecuméniques pacifiques, il géra avec une grande maturité et une grande sagesse l’insurrection de 1804 et la difficile situation qui s’ensuivit. L’intervention de Kyprianos prouva ses capacités diplomatiques, mais fut également révélatrice de son point de vue politique quant à l’avenir de Chypre.

Les faits se déroulèrent comme suit[20]: en mars 1804, l’augmentation des contributions fiscales, qui coïncidait avec une disette, provoqua une grande agitation. Aux troubles prirent part de nombreux musulmans, et quelques chrétiens. La colère du peuple était essentiellement dirigée contre le drogman Hadzigeorgakis Kornessios[21], lequel ne put sauver sa tête qu’en fuyant secrètement à Constantinople. Les gens en fureur assiégèrent l’Archevêché et malmenèrent l’archevêque Chrysanthos. La mise à sac de l’Archevêché ne put être empêchée que grâce à l’intervention de Kyprianos, après que ce dernier fût parvenu, par des promesses et des subornations, à calmer la rage des révoltés. Entretemps, après des démarches entreprises par Hadzigeorgakis Kornessios, fut envoyée à Chypre une armée constituée de 2000 hommes, laquelle s’établit à Aghios Dometios et assiégea Nicosie. Le siège dura des mois, et pour les personnes qui vivaient intra-muros, la situation était devenue insupportable, puisque d’un côté, à l’intérieur de la ville se trouvaient les rebelles turcs, et à l’extérieur les troupes ottomanes. Les consuls de France, d’Angleterre et de Russie intervinrent afin de faire procéder à des négociations entre les rebelles et les assiégeants. A ces négociations se mêla Kyprianos, lequel s’occupait également de la gestion financière des dépenses des troupes, ce qui prouve la confiance accordée par les autorités ottomanes à l’archevêque[22].

Par ailleurs, le soutien total que le Patriarcat OEcuménique apportait à Kyprianos apparaît dans le fait que l’ancien archevêque se retira pour laisser sa place à Kyprianos. En juin 1810, la Sublime Porte émit une ordonnance décrétant l’exil de Chrysanthos, ainsi qu’un bérat ratifiant l’élection de Kyprianos. A cette époque, l’Eglise de Chypre était administrée par la famille de l’archevêque Chrysanthos, puisque les deux autres évêques, de Paphos et de Kition, étaient ses neveux. Les partisans de Kyprianos avaient donc procédé à différentes actions, qui vraisemblablement comportaient des subornations – probablement avec la participation de Kyprianos lui-même –, et parvinrent ainsi à convaincre les autorités turques d’émettre un décret impérial pour expatrier l’archevêque Chrysanthos et son neveu, l’évêque de Kition. Effectivement, l’archevêque fut exilé en juin 1810 et mourut peu de temps après, en Eubée[23]. La responsabilité de Kyprianos, en ce qui concerne l’expatriation de Chrysanthos, est aussi démontrée par le fait que, presque parallèlement à l’émission du décret impérial ordonnant l’exil de ce dernier, arrivèrent à Chypre les documents impériaux relatifs par lesquels Kyprianos était nommé nouvel archevêque de Chypre, tandis qu’à la place de l’évêque exilé de Kition, Chrysanthos, c’est l’archimandrite Mélétios qui fut nommé. Le Patriarche OEcuménique, dans deux de ses lettres, ordonna à l’Archevêque du Sinaï Constantios – lequel refusait de s’exécuter, jugeant cet acte contraire aux canons – de consacrer le nouvel archevêque de Chypre. Le sacre de Kyprianos eut finalement lieu le 30 octobre 1810[24].

Kyprianos, en tant qu’archevêque, était responsable vis à vis des autorités ottomanes de l’encaissement des impôts[25] et il invitait les gens à obéir et à acquitter les impôts dus afin de ne pas provoquer le courroux des autorités. Ainsi, par exemple, en 1812, en enjoignant dans un document adressé aux Chrétiens du district de Lefka de payer immédiatement leurs impôts, et bien qu’il reconnaisse que cela n’est pas dans les possibilités des plus pauvres, Kyprianos leur signale toutefois que si les impôts n’étaient pas acquittés à temps, il leur faudrait s’attendre à des représailles de la part des autorités impériales. Par ailleurs, dans un autre document en rapport adressé aux Chrétiens du district de Mesaoria et daté du 4 octobre 1820, il menace d’excommunication tous ceux qui, dans le but d’échapper aux taxes, ne déclareraient pas leurs véritables revenus. De tout cela ressort clairement la volonté de Kyprianos de se conformer aux lois de l’Empire ottoman.
L’Anglais John M. Kinneir, qui visita Chypre en janvier 1814, considère Kyprianos comme l’exploiteur du peuple. Il écrivait que le gouverneur et l’archevêque s’occupent du commerce des céréales bien plus qu’aucun autre habitant de l’île, et que d’ordinaire, ils s’appropriaient la totalité de la production à un prix qu’ils fixaient eux-mêmes, pour ensuite l’exporter ou la vendre à un prix fort élevé[26]. Un autre voyageur anglais, William Turner, qui se rendit à Chypre en 1815, dit que “nominalement, Chypre est sous l’autorité d’un Bey nommé par le Kapudan Pacha[27], en réalité cependant elle est gouvernée par l’archevêque et le clergé qui en dépend. Les résultats de leur administration sont visibles partout dans l’île, car le Grec, bien que rarement, acquiert de la puissance, et lorsqu’il l’acquiert, il se laisse enivrer par elle et se transforme, de répréhensible diffamateur, en tyran cupide”[28]. Néanmoins, l’Archevêque du Sinaï Constantios qui, comme nous l’avons vu, avait consacré Kyprianos après un ordre strict du Patriarche OEcuménique, estimait que seul Kyprianos – puisqu’il connaissait tout le monde – avait le pouvoir de protéger les chrétiens de l’île dans ces circonstances et de calmer d’éventuelles agitations[29].

Β. Le contact de Kyprianos avec les membres de l’Hétairie, son refus de voir Chypre participer à l’insurrection, et sa mort en martyr.

La voie pacifique adoptée par Kyprianos en vue du progrès et de la prospérité vinrent bouleverser les idées révolutionnaires de la Philiki Hétairia[30]. Toute l’attitude de Kyprianos durant la révolution de 1821[31] est ambiguë. Comme nous l’avons déjà dit, nous ne savons pas s’il était question que la révolution s’étende aussi à Chypre, et quelle fut exactement la position de Kyprianos à ce sujet. La question est de savoir si le fait que la révolution n’éclata pas à Chypre était dû à l’hésitation de Kyprianos et des autres archontes de suivre le mouvement qui s’était déclenché et qui avait pour épicentre le Péloponnèse.

Deux des encycliques conservées de Kyprianos se rapportent intégralement à ce sujet. Dans la première, qui est datée du 22 avril 1821 et se trouve au Musée Historique et Ethnologique d’Athènes, il appelle les Chrétiens à déposer les armes qu’ils pourraient éventuellement détenir, et déclare sa loyauté vis à vis du Sultan qui, comme l’écrit Kyprianos, “ne désire pas autre chose que de se protéger de ses ennemis”[32]. La seconde encyclique de Kyprianos, enregistrée dans le Codex A (Kώδιξ A) de l’Archevêché, circula le 16 mai 1821, et dans celle-ci, l’archevêque invite les Chrétiens à ne pas agir, à demeurer calmes et à se comporter en rayas, même jusque dans leur façon de s’habiller[33]. Il est manifeste que Kyprianos tente d’éviter tout ce qui pourrait constituer la moindre provocation. Cette encyclique de l’archevêque n’est pas sans rappeler une démarche analogue du Patriarche Grégoire V, lequel avait également invité les Grecs à faire tout leur possible afin d’éviter de s’opposer à l’autorité du Sultan[34]. Cette attitude en général de Kyprianos par rapport à la révolution grecque de 1821 nous amène à conclure que ce dernier suivait pas à pas la ligne politique adoptée par le Patriarcat OEcuménique et les chefs des Phanariotes. Autant le Patriarche que les Phanariotes étaient une partie organique de l’Empire ottoman et constituaient des institutions respectables de l’Etat. Ils servaient en outre l’oecuménisme et la cohabitation pacifique.

Il est certain que la Philiki Hétairia s’efforçait d’intégrer Chypre dans ses projets de révolution générale. D’abord, Dimitrios Ypatros de Metsovo, membre de l’Hétairie, était arrivé de Constantinople à Chypre et entretenait des contacts secrets avec l’archevêque Kyprianos. Le résultat de ces concertations fut la promesse, aussi bien de la part de l’archevêque que de différents notables, de soutenir de toutes les façons qu’ils pourraient le combat qui se préparait[35]. Sur la base de ce qui fut décidé, Alexandre Ypsilantis accrédita un peu plus tard un autre membre de l’Hétairie, Antonios Pelopidas, pour voyager en Egypte et à Chypre et pour procéder au recouvrement des contributions des membres de l’Hétairie qui demeuraient là-bas. Kyprianos fut mis au courant de l’expédition de Pelopidas par Ypsilantis lui-même. En écrivant à Kyprianos le 8 octobre 1820, Ypsilantis l’informe que la rentrée de l’Ecole approche (η έναρξις του Σχολείου εγγίζει) et il l’invite à soutenir financièrement l’Ecole du Péloponnèse[36]. Dans la correspondance codée, l’Ecole (Σχολείον) signifiait la révolution ; par conséquent, Ypsilantis se hâte d’annoncer à Kyprianos que le début de la révolution est proche. George Hill estime qu’à l’Assemblée Générale de l’Hétairie, on n’était pas certain que Kyprianos concrétiserait sa promesse de soutenir financièrement le combat[37]. Quoi qu’il en soit, n’ayant pas connaissance des échanges qui eurent eu lieu oralement entre Kyprianos et les envoyés de l’Hétairie à Chypre Dimitrios Ypatros et Antonios Pelopidas, nous ne sommes pas en mesure de savoir si l’on avait demandé à Kyprianos d’entraîner également Chypre dans le soulèvement, même si cela est très probable. En tout cas, il ne semble pas que cela fût dans l’intention de Kyprianos, car aucune préparation n’eut lieu dans ce sens. L’archevêque exclut Chypre du cercle révolutionnaire[38].

En vérité, Kyprianos jugeait que, sans armement satisfaisant, sans forces instruites et expérimentées, sans aide à attendre de nulle part – l’île étant assez éloignée du sud de la péninsule Balkanique et des îles où s’était déclarée la révolution – et que, d’autre part, avec l’Asie Mineure toute proche, d’où l’on pouvait très facilement envoyer des troupes, toute action entreprise de façon irréfléchie entraînerait de nombreux massacres. Ainsi, il essaya d’éviter de toutes les façons possibles le déclenchement de la révolution dans l’île. Kyprianos, bien qu’ayant promis aux membres de l’Hétairie une aide financière, pensait que le soulèvement contre le régime ottoman aurait des conséquences funestes. Dès le début de la révolution, la Sublime Porte ordonna le désarmement immédiat de tous les chrétiens de l’Empire, en envoyant également un décret à Chypre, où la loyauté des chrétiens de l’île était bien connue, et en rappelant que par le passé, même lorsque les Turcs musulmans avaient fait défection, les chrétiens s’étaient unis aux troupes ottomanes. Kyprianos invita aussitôt les chrétiens à déposer les armes qu’ils possédaient et à demeurer obéissants à la loi. Le 23 avril 1821, les chrétiens de Chypre rendirent d’eux-mêmes les armes, montrant ainsi leur volonté de se soumettre. Cependant, le nouveau pacha de Chypre, Kütchuk Mehmet, à peine établi dans ses fonctions (1820), avait cherché à présenter à la Porte l’île comme étant au bord de la révolution. C’est ainsi que l’église de la Faneromeni à Nicosie se vit accusée de stocker des explosifs. Egalement, on disait que des proclamations révolutionnaires circulaient dans l’île, lesquelles auraient été portées et distribuées par l’archimandrite chypriote Theophylacte Theseus, neveu de Kyprianos et membre lui aussi de la Philiki Hétairia[39]. Avec tout cela, et parallèlement au désarmement, le pacha demanda à faire ratifier des proscriptions à l’encontre de 486 personnes chrétiennes importantes. Il fit parvenir cette liste à la Porte, avec l’accusation que ces personnes préparaient la révolution dans l’île. Sur cette liste figurait également l’archevêque. Le Sultan Mahmut signa le décret d’exécution des chrétiens désignés, et il envoya à Chypre 4000 soldats par le truchement du Pacha d’Acre. Ceux-ci débarquèrent à Larnaca en mai 1821. Ils semèrent la panique dans les rues et prirent pour cible le drapeau du Consulat de France, car les Français se considéraient comme les alliés des Grecs révoltés[40].

Le décret fut exécuté le 9 juillet 1821. Kyprianos fut pendu à un mûrier sur la place du sérail. Les chrétiens l’enterrèrent la nuit, dans le plus grand calme, dans l’enceinte de l’église de la Faneromeni. Les exécutions se poursuivirent à Nicosie pendant un mois et le nombre des victimes dépassa de loin les 486 prévues par la liste. Les nombreux massacres furent accompagnés de confiscations et de vols de biens. De nombreuses personnes trouvèrent refuge dans les consulats des pays européens à Larnaca et partirent pour l’étranger. La Porte, lorsqu’elle apprit les massacres et le pillage des biens ecclésiastiques et privés, ordonna que ce qui avait été volé aux monastères, ainsi que les objets précieux des églises, soient rendus à l’Archevêché. En ce qui concerne plus spécifiquement Kyprianos, le fait qu’il refusa de s’enfuir et de recourir aux Consulats de Larnaca pour pouvoir, de là, partir pour l’étranger, le révèle comme un véritable chef spirituel et politique.

 

 

[1] Le mot Hellène (Έλλην) ne connaissait pas une large diffusion à la fin du XVIIIe et au début du XIXe siècle, pas plus que le mot “grec” (Γραικός). Au début de l’époque contemporaine, les Grecs continuaient de s’appeler eux-mêmes Romioi (Pωμιοί), et de désigner leur langue comme le roméique (Pωμαίικα).

[2] G. CASTELLAN, Histoire des Balkans, Paris, 1991, p. 91, p. 215.

[3] “A la fin du XVIIIe siècle, la classe bourgeoise grecque acquérait une flotte de commerce qui contrôlait plus des trois quarts du commerce de la Méditerranée orientale et de la mer Noire”; D. KITSIKIS, Συγκριτική Iστορία Eλλάδας και Tουρκίας στον 20ο αιώνα [ Histoire comparée de la Grèce et de la Turquie au XXe siècle], Athènes, 1978, pp. 55-56.

[4] Sur la Philiki Hétairia (Φιλική Eταιρεία), voir G. CASTELLAN, Histoire des Balkans, op. cit.,
pp. 262-266 ; R. CLOGG, A short History of modern Greece, Cambridge, 1986, p. 47.

[5] R. B. GLYNN, “Notice sur l’insurrection des Grecs contre l’Empire Ottoman. A Russian view on the Greek War of Independance”, Balkan Studies (BS), 14 (1973), pp. 47-115. Voir également H. N. HOWARD, “The Ancient Greeks and the Greeks of the war of Independance”, BS, 4 (1963), pp. 251- 264, et O. B. SPARO, La Libération de la Grèce et la Russie (1821-29), Moscou, 1965.

[6] “Notre richissime congénère Georgios Zariphis révéla en juillet 1878 à l’ambassadeur anglais Layard le plan qui prévoyait l’union de la Grèce et de la Turquie en un seul empire, à l’instar de l’Autriche- Hongrie. Il saute aux yeux que les congénères de Constantinople s’inspiraient de l’idée oecuménique qui poursuivait le rétablissement de l’Empire byzantin et qui ne pourrait se réaliser qu’avec la coopération de la Porte” ; Ch. KARDARAS, Tο Oικουμενικόν Πατριαρχείον και ο Aλύτρωτος Eλληνισμός της Mακεδονίας, Θράκης, Hπείρου, μετά το Συνέδριο του Bερολίνου [Le Patriarcat œcuménique et l’hellénisme non-libéré de Macédoine, de Thrace et d’Epire, après le Congrès de Berlin],Athènes, 1996, pp.14-15.

[7] Cf. G. CASTELLAN, Histoire des Balkans, op. cit., pp. 258-259. Les Grecs étaient nombreux dans les îles – Archipel, Crète, Chypre, îles Ioniennes – où ils constituaient même une majorité écrasante.

[8] “... The division was not absolute: many Greeks in the Kingdom shared the beliefs of the eviction of the ‘Constantinopolites’ while among the latter there were influential leaders who advocated the forceful eviction of the Turcs from Europe. Koundouriotis’s despatches from Constantinople are particularly revealing in this respect” ; E. KOFOS, Greece and the Eastern Crisis 1875-1888, Thessalonique, 1975, p. 29. Voir aussi C. MANGO, The Fanariots and the Byzantine Tradition, Variorum Reprints, Londres, 1984, et A. DASCALAKIS, “Les Phanariotes et la Révolution grecque de 1821”, L’époque phanariote, Symposium Oct 1970, Institut for Balkan Studies, Thessalonique, 1974, pp. 71-76. Voir aussi R. CLOGG, A short History, op. cit., p. 32, où on lit : “significant factor dividing the insurgents was cultural. This was the schizophrenia of the Greek heritage: oriental and Byzantine on the one hand; occidental and romantic-revolutionary on the other”.

[9] D. DAKIN, Greek Unification, 1770-1923, Londres, 1972, p. 8 ; D. KITSIKIS, L’Empire ottoman, coll. Que sais-je?, PUF, Paris, 1985, p. 68 ; St. RUNCIMAN, The Great Church in Captivity, Cambridge, 1968.

[10] En ce qui concerne cette attitude oecuménique du Patriarche, voir entre autres, AMAE, CP, Turquie, 440, Thérapia, 4 août 1880, f. 31r-47v, à propos de la protection de tous les chrétiens et pas seulement des grécophones.

[11] 11 M. HAKKARIAN, “Phanariots seen by Western Travellers”, Πρακτικά A\ Eυρωπαϊκού Συνεδρίου Nεοελληνικών Σπουδών, Bερολίνο, 2-4 Oκτ. 1998, O Eλληνικός Kόσμος ανάμεσα στην Aνατολή και στην Δύση, 1453-1981, τ. B, Athènes, 1999, pp. 223-227.

[12] Ap. DASCALAKIS, “Les Phanariotes” , op. cit.,pp. 71-76. Et il faut reconnaître que l’activité des Phanariotes en Grèce pendant la révolution, ou leur rôle, soit en tant que diplomates, soit en tant que combattants ou qu’hommes politiques, fut très important. Mihail Soutzos, dernier des princes phanariotes des principautés, qui s’enfuit en Russie après l’échec de la révolution d’Ypsilantis, fut sous Capodistria le premier agent diplomatique de la Grèce à Genève et à Paris et, plus tard, sous le règne d’Othon, il fut nommé ambassadeur à Saint Pétersbourg.

[13] A. EMILIANIDIS, “Προνόμια των Aλλοδαπών και Διομολογήσεις εν Kύπρω” [“Privilèges des Etrangers et Capitulations à Chypre”], Kυπριακαί Σπουδαί (KΣ), Α, 1937, pp. 1-59 ; C. KYRRIS, “Eυρωπαϊκή διπλωματία και Kύπριοι Προύχοντες από την Eπανάσταση του 1821 έως το 1847” [“Diplomatie européenne et notables chypriotes de la Révolution de 1821 à 1847”], Hommage à Constantin Spyridakis, Nicosie, 1964.

[14] Sur la place des évêques à Chypre durant la période ottomane, voir en général Th. PAPADOPOULLOS, “Orthodox Church and Civil Authority”, Journal of Contemporary History, n° II, 1964.

[15] F. ZΑΝΕΤΟΣ, Iστορία της νήσου Kύπρου. Aπό της Aγγλικής Kατοχής μέχρι σήμερον [Histoire de l ’î le de Chypre . De l’Occupation anglaise à nos jours],t. A, Larnaca, 1910, p. 1149. Voir également L. PHILIPPOU, Tα ελληνικά γράμματα εν Kύπρω επί Tουρκοκρατίας [Les lettres grecques à Chypre durant la domination turque], Nicosie, 1930 ; G. PRODROMOU, “H εκπαίδευση στην Kύπρο το 18ον και 19ον αιώνα” [“L’Education à Chypre au XVIIIe et XIXe siècle”], dans Ioannidis George (éd.), La vie à Chypre au XVIIIe et au XIXe siècle (en grec), Conférences de l’Université Populaire [1], Nicosie, 1984, pp. 279-308.

[16] Voir en général A. ARGYRIOU, “Nationalismes et supranationalisme dans l’Eglise orthodoxe à l’époque turque”, Aspects de l’Orthodoxie, Colloque de Strasbourg, nov. 1987, PUF, Paris, 1989, pp. 135-152.

[17] Voir en général S. MENARDOS, H εν Kύπρω Iερά Mονή της Παναγίας του Mαχαιρά [Le Monastère de la Vierge de Machairas à Chypre], Le Pirée, 1929.

[18] F. ΖΑΝΕΤΟΣ, Iστορία της νήσου Kύπρου, op. cit., p. 1149.

[19] P. M. KITROMILIDIS, Kυπριακή Λογιοσύνη 1571-1878 [Belles-Lettres Chypriotes 1571-1878], Limassol, 2002, p. 177.

[20] Sur la description des événements, voir en général G. HILL, A History of Cyprus, vol. IV, Cambridge, 1948, pp. 80-99, 104-110 et 355-358.

[21] Α. INTIANOS, “Συμβολή στη μελέτη της Kυπριακής Iστορίας, Δραγομανία και Δραγομάνοι στην Kύπρο” [“Contribution à l’étude de l’Histoire Chypriote, Tradition des Drogmans et Drogmans à Chypre”], ΚΣ, B (1938), pp. 141-195. Κ. MYRIANTHOPOULOS, Xατζηγεωργάκης Kορνέσιος, ο διερμηνεύς της Kύπρου, 1779-1809, ήτοι Συμβολαί εις την ιστορίαν της Kύπρου επί Tουρκοκρατίας (1570-1878) [Hadzigeorgakis Kornessios, l’interprète de Chypre, 1779- 1809, ou Contributions à l’histoire de Chypre sous la domination turque (1570-1878)], Nicosie, 1934.

[22] F. ΖΑΝΕΤΟS, Iστορία της νήσου Kύπρου, op.cit., pp. 1146-1147.

[23] Voir L. PHILIPPOU, H Eκκλησία Kύπρου επί Tουρκοκρατίας [L’Eglise de Chypre sous la domination turque], Nicosie,1975, p. 132.

[24] F. ΖΑΝΕΤΟS, Iστορία της νήσου Kύπρου, op.cit., p. 1147.

[25] G. DIONYSSIOU, “O Φορολογικός ρόλος της Eκκλησίας της Kύπρου τον τελευταίο
αιώνα της Tουρκοκρατίας” [Le rôle fiscal de l’Eglise de Chypre au dernier siècle de la domination turque”], EEKEIΣ (Eπιστημονική Eπετηρίς της Kυπριακής Eταιρείας Iστορικών Σπουδών), A (Nicosie, 1992), pp. 87-107 ; C. KYRRIS, “The role of Greeks in the Ottoman administration of Cyprus”, Actes du Premier Congr è s International des Etudes Chypriotes(Nicosie, 14-19 avril 1969), t. III/1, Nicosie, 1973, pp. 155-179.

[26] Cl. D. COBHAM, Excerpta Cypria : Materials for a History of Cyprus, Cambridge, 1908, pp. 414-417. Le même auteur signale que Kyprianos vivait dans le luxe à l’archevêché, où Kinneir fut hébergé, et que ce dernier put y goûter du pain confectionné avec du lait, que l’on avait offert au dîner ; selon ses dires, c’était le meilleur pain qu’il ait jamais mangé de sa vie.

[27] Ministre de la Marine.

[28] Cl. D. COBHAM, Excerpta Cypria, op. cit., p. 447.

[29] Codex A de l’Archevêché, p. 157. Les Chypriotes, dans un rapport qu’ils adressèrent au Patriarche oecuménique Jérémie III en 1810, un peu après l’accession de Kyprianos au siège archiépiscopal, le qualifient de digne, sage, vigilant et vertueux au plus haut degré, et mentionnent qu’il oeuvra infatigablement pour défendre le pays dans tous les moments difficiles.

[30] Parmi les encycliques parues et conservées, l’une, datée de 1815, constitue une lettre d’excommunication à l’encontre des franc-maçons (αφοριστήριον γράμμα εναντίον των φραμμασόνων).Kyprianos considérait les franc-maçons non seulement comme une hérésie, mais aussi comme étantopposés à l’autorité du Sultan. Voir le texte, tel qu’il a été publié par Th. Papadopoullos, dans “Προεπαναστατική παρουσία του τεκτονισμού εν τω Eλληνικώ χώρο” [“Présence de la francmaçonneriedans l’espace grec avant la révolution”], Στασίνος, III, 1968, pp. 62-65. En tout cas, leConsul de France Ratez, dans une lettre à l’archevêque en 1817, déclara “qu’il n’y avait aucune logemaçonnique régulière formée à Larnaca, mais que c’étaient simplement des agapes fraternellesd’étrangers, auxquelles prenaient part des Grecs et des Turcs” ; N. KYRIAZIS, Kοινοτική δράσις της πόλεως Σκάλα-Λάρνακα [Activité communale de la ville de Skala-Larnaca], Larnaca, 1947, p. 15.

[31] Sur la relation entre Chypre et la Révolution grecque, voir l’oeuvre bien connue de J. KOUMOULIDES, Cyprus and the War of Greek Independance 1821-1829, Londres, 1974.

[32] “Εγκύκλιος Επιστολή του Αρχιεπισκόπου Κυπριανού προς τους ιερείς και τους λοιπούς Χριστιανούς” [“Lettre encyclique de l’Archevêque Kyprianos adressée aux prêtres et aux autres Chrétiens”], dans H Eλληνική Eπανάσταση του 1821Έκθεση κειμηλίων [La Révolution Grecque de 1821–Exposition d’objets conservés], Athènes, 1991, p. 40.

[33] “Σπουδαίον Έγγραφον του Eθνομάρτυρος Aρχιεπισκόπου Kυπριανού” [“Document important de l’Archevêque Kyprianos, martyr de la Nation”], Aπόστολος Bαρνάβας 80 (210), 10 juillet 1930, pp. 440-441.

[34] K. CHRYSANTHIS, “Παρατηρήσεις πάνω στην εγκύκλιο κατά των μασόνων του Aρχιεπισκόπου Kυπριανού” [“Remarques au sujet de l’encyclique de l’Archevêque Kyprianos contre les maçons”], ΚΣΜΓ (1979), pp. 163-168.

[35] Sur les contacts entre Kyprianos et l’Hétairie, voir E. PROTOPSALTIS, H Kύπρος εις τον αγώνα του 1821 [Chypre dans le combat de 1821], Athènes, 1971, pp. 14 15.

[36] J. PHILEMON, “Σχέδιον γενικόν” , Δοκίμιον ιστορικόν περί της ελληνικής επαναστάσεως [“Projet général”, Essai historique sur la Révolution grecque], vol. I, Athènes, 1859, p. 53.

[37] G. HILL, A History of Cyprus, op.cit., p. 124.

[38] A. BLONDY, “Malte et Chypre, identité et diversité des destins de deux îles méditerranéennes”, dans : Manuel Jan et Fernando Martinez, El Mediterraneo, confluencia de culturas/La Méditerranée, confluence de cultures, Universidad de Almeria, Presses de l’Université Paris-Sorbonne, 2002 (pp. 497- 514), p. 501.

[39] A. KOUDOUNARIS, “H οικογένεια των Θησέων” [“La famille des Theseus”], ΚΣΛΗ-ΛΘ
(1974-1975), pp. 77-92. Du même, “H προσωπογραφία του αρχιμανδρίτου Θεοφυλάκτου Θησέως» [«Le portrait de l’archimandrite Theophylacte Theseus”, K Σ ΜΔ (1980), pp.119-130; C.KYRRIS, Νέαι ειδήσεις και ανέκδοτα έγγραφα περί Κυπριανού Θησέως, Νικολάου Θησέως και του πατρός αυτών Οικονόμου παπα-Σάββα» [ Nouvelles informations et documents inedits sur Kyprianoς Theseus, Nikolaos Theseus et leur pere l’econome pretre Savvas”] EKEE 11 (1981-1982), p.427-453; L.PHILIPPOU, Tα ελληνικά γράμματα, op.cit., p.132. Du meme, “Νικόλαος και Θεόφιλος Θησείς» [«Nikolaos et Theophilos Theseus »], Πάφος Α (1935), pp.81-85. Eleni ANGHELOMATI-TSOUGGARAKI, «Μια άγνωστη ενέργεια του Νιολάου Θησέως. Αίτηση για αγγλική προστασία της Κύπρου» [ Une action inconnue de Nikolaos Theseus. Requete en faveur dune protection anglaise de Chypre»], Πρακτικά Β Κυπριολογικού Συνεδρίου, Γ, pp.93-95.

[40] Sp. TRIKOUPIS, Ιστορία της Ελληνικής Επαναστάσεως [ Histoire de la Revolution Grecque], VI, Athenes, 1959-1961; G.HILL, A History of Cyprus, op.cit., pp.125-126